Bénin : quand le maintien des filles à l’école passe par des sensibilisations sur la ménarche

Article : Bénin : quand le maintien des filles à l’école passe par des sensibilisations sur la ménarche
Crédit: Chamsou-Dine Baguiri
6 novembre 2022

Bénin : quand le maintien des filles à l’école passe par des sensibilisations sur la ménarche

Joséphine Dakossi, directrice de l’école primaire publique Sounon Bouro dans le village de Boko (Nord-Bénin), parle d’hygiène menstruelle avec les filles de son école ayant déjà leurs menstrues. Le but est de les préparer à cette étape de leur vie afin qu’elles ne s’isolent pas ou n’abandonnent pas les cours. Une initiative qui est en conformité avec l’un des objectifs du projet Swedd-Bénin : celui du ‘’maintien des filles à l’école’’ afin de lutter contre le décrochage scolaire dans le village.

La ménarche, la première période de menstruations, est un moment essentiel dans la vie d’une fille. Une étape qui passe de l’enfance à l’adolescence. En Afrique, plusieurs filles vivent ces moments avec beaucoup d’ignorance ou peu d’informations fiables sur la période de menstruations. Selon le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF), 66% des jeunes filles n’ont pas la bonne information en ce qui concerne la gestion des menstrues. Ce qui n’est pas sans conséquence sur leur bien-être et cursus scolaire.

Les raisons qui motivent Joséphine à agir

« Aujourd’hui, certaines filles en deuxième année de cours élémentaire au primaire ont déjà leurs premières menstrues. Lorsqu’elles sont surprises par les menstrues à l’école, elles sont gênées de se retrouver tachées. Parfois, elles sont victimes de stigmatisation et de moqueries de certains de leurs camarades de classe. Pour éviter cela, elles rentrent à la maison. Cet état de chose pousse les filles à rester au moins 4 jours à la maison. Soit une semaine tous les mois en pleine année scolaire. Conséquence : mauvais résultats scolaires en fin d’année puis interruption de la scolarité ».

Joséphine Dakossi, Directrice de l’école primaire publique de Sounon Bouro dans la commune de N’Dali au Nord-Bénin

Un dicton répandu dans le Nord du Bénin affirme : « pour l’arrivée de ses premières règles, une fille doit être chez ses parents. Pour ses deuxièmes règles, elle doit habiter chez son mari ». C’est dire qu’une fille peut être déjà donnée en mariage dès qu’elle commence déjà par avoir ses premières règles. C’est pourquoi Joséphine Dakossi a décidé d’agir.

Lutter contre le décrochage scolaire des filles

Une fois par semaine, l’enseignante rassemble toutes les filles des classes de première et deuxième année du cours moyen pour une discussion. Le sujet des échanges est relatif à la gestion de l’hygiène menstruelle. Elle veut réduire le nombre de filles qui s’absentent de l’école en raison de la venue de leurs menstrues. Le but est de permettre aux filles d’être présentes 5 jours sur 5 à l’école.

L’enseignante commence par mettre les filles en confiance. Puis elle revient sur les différences entre une fille et un garçon, un homme et une femme. Ensuite, elle aborde le point des caractères sexuels secondaires. Durant les jeux de questions-réponses, certaines filles avouent qu’elles ont déjà leurs premières menstrues. Elles estiment que tout a changé depuis qu’elles ont commencé par avoir leurs règles.

« J’ai honte et j’ai peur lorsque j’ai mes menstrues »

« J’ai honte et j’ai peur lorsque j’ai mes menstrues. À l’école, l’état des toilettes ne me permet pas de bien me nettoyer. » L’une de ses camarades n’en dira pas moins : «  Je suis souvent victime des moqueries venant de mes camarades garçons qui chantent partout que je saigne et que je dois avoir une maladie contagieuse ». Toutes les écolières racontent des situations similaires, qui les poussent à ne pas venir à l’école lorsqu’elles remarquent que leurs règles sont venues.  

Joséphine Dakossi entend corriger le tir. L’éducatrice informe périodiquement les filles sur l’essentiel à savoir du cycle menstruel. Elle aborde aussi le calcul du cycle menstruel de la femme et l’entretien des serviettes hygiéniques avec les écolières. Avec les autres enseignants de l’école, les garçons sont également sensibilisés sur les bonnes conduites à adopter lorsqu’ils remarquent qu’une fille a des fuites ou de tache de sang à l’école.

La directrice ne manque pas de solliciter, par moments, les mamans des filles. L’objectif est de leur expliquer qu’il est important d’assister leurs enfants pour gérer de façon sereine cette étape importante de leur vie. Le combat de l’enseignante est de pouvoir maintenir le maximum de filles à l’école jusqu’en deuxième année du cours moyen.

Le plan sectoriel de l’éducation (PSE) 2018-2030 indique que 1.903.069 enfants de 3 à 17 ans sont hors du système scolaire, dont 52% de filles. C’est pourquoi l’initiative de l’éducatrice est salutaire et vient à point nommé, en conformité avec les objectifs du projet Sweed-Bénin. Joséphine Dakossi est donc un exemple à suivre. Son initiative doit faire école dans d’autres localités du Bénin et permettra de donner confiance à d’autres filles pour continuer à venir à l’école même lorsqu’elles sont réglées.

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